par:Eliya Davidov, parcours «Chemoinformatics and Materials Informatics», Bar Ilan-Strasbourg, 2023
En 1998, Frank Brown proposa le terme de chimio-informatique, qu’il définit comme « toutes les ressources d’information dont un scientifique a besoin pour optimiser les propriétés d’un ligand afin qu’il devienne un médicament ». Cependant, les fondements de la chimioinformatique, ou chémoinformatique, remontent bien plus loin: aux années 1950 et 1960, aux débuts de la chimie computationnelle [1].
En 1957, Ray et Kirsch publièrent le premier algorithme de recherche par sous-structures. Leur article pionnier décrivait « un ensemble de machines... capables d’effectuer une tâche complète de traitement de données impliquant des infrastructures de stockage de données ». Cet article a posé les fondements de l’interrogation de bases de données par structures, similitudes et sous-structures; des concepts fondamentaux qui deviendront plus tard essentiels en chimioinformatique. En 1963, Vleduts a proposé le concept de « schémas de squelettes réactionnels » et de centres de réaction, annonçant l’émergence de la synthèse assistée par ordinateur : « la possibilité d’une solution par ordinateur... la sélection des voies de synthèse pour un composé donné » [2]. Un autre moment décisif se produisit en 1962 lorsque Hansch introduisit le QSAR (Quantitative Structure-Activity Relationships), reliant une activité biologique aux structures chimiques en utilisant des facteurs (descripteurs moléculaires) tels que les effets stériques, les propriétés électroniques et l’hydrophobicité.
Au cours des dernières décennies, avec l’essor de l’intelligence artificielle, la chimioinformatique a évolué. Désormais, son champ d’application dépasse la seule optimisation des ligands et englobe « l’application de méthodes informatiques pour résoudre des problèmes chimiques » [3]. Sans être exhaustif, cela comprend les modèles prédictifs pour des activités biologiques, la découverte de médicaments, la conception basée sur les ligands, l’amarrage moléculaire en 3D, les interactions protéine-ligand, le criblage virtuel, les simulations et la dynamique moléculaire (figure 1). Bien que la majeure partie du domaine soit axée sur la biologie, la chimioinformatique joue également un rôle dans la science des matériaux, en contribuant à la conception de batteries, de matériaux énergétiques et d’autres systèmes physiques.
Quel est l’avenir de la chimioinformatique ? Avec l’IA, l’augmentation de la puissance de calcul et l’afflux de données volumineuses, l’avenir promet de nouvelles innovations. L’IA devrait pousser la chimioinformatique vers de nouvelles applications, tels que la découverte de médicaments pour les maladies rares. L’informatique quantique changera certainement la donne dans le domaine des simulations et de la modélisation, en permettant de nouvelles approches algorithmiques pour résoudre, par exemple, des problèmes complexes d’isomorphisme de graphes.
Figure 1. La chimioinformatique est née des solutions trouvées aux problèmes liés aux données que partagent de nombreux autres domaines scientifiques. Les thèmes de la chimie médicinale et de la découverte de médicaments sont encore aujourd’hui des moteurs importants de la chimioinformatique.
References
1. P. Willett, Chemoinformatics: a history. WIREs Comput. Mol. Sci., 2011, 1, 46-56. https://doi.org/10.1002/wcms.1
2. G.E. Vleduts, Concerning one system of classification and codification of organic reactions. Inf. Stor. Ret. 1963, 1, 117–146. https://doi.org/10.1016/0020-0271(63)90013-5
3. J. Gasteiger, The central role of chemoinformatics. Chemometr. Intell. Lab. Syst. 2006, 82, 200–209. https://doi.org/10.1016/j.chemolab.2005.06.022